Localisation et « Le portefeuille de la Chine »
Interrogez n’importe quelle personne ayant déjà fait des affaires en Chine et elle aura une histoire à vous raconter. Il s’agit d’un environnement dynamique et unique pour les entreprises et les consommateurs, et la récente explosion du commerce en ligne ajoute un autre niveau de complexité, mais aussi d’opportunités. HI-COM a discuté avec Shaun Rein, fondateur de CMR Consulting et auteur de best-sellers internationaux, pour savoir comment les entreprises peuvent mener à bien leur stratégie chinoise.
HI-COM a discuté avec Shaun Rein, directeur général de CMR Consulting et auteur de best-sellers internationaux, pour savoir comment les entreprises peuvent mener à bien leur stratégie chinoise. Shaun Rein est expert de l’économie et du marché de la consommation chinoise. Il est également auteur et chroniqueur régulier dans les magazines américains Forbes, the Wall Street Journal, Harvard Business Review, The Economist, Financial Times, Newsweek International, Bloomberg, Time, et the New York Times.
Mr Rein a récemment sorti son troisième livre “The War for China’s Wallet: Profiting from the New World Order” (« La Guerre du Portefeuille de la Chine : Tirer profit du nouvel ordre mondial »).
HI-COM: D’après votre expérience, quelles ont été les fausses idées véhiculées par les entreprises étrangères au sujet de la Chine ?
Shaun Rein: Les entreprises qui arrivent en Chine peuvent sur-localiser ou sous-localiser. Lorsque je dis sur-localiser, je veux parler du fait qu’elles oublient leur marque principale, leur ADN de base, et le résultat est qu’elles n’ont pas de direction ou de stratégie précise lorsqu’elles se lancent en Chine. L’un des exemples est Barbie [Mattel]. Lorsque Barbie est arrivée en Chine, l’entreprise a ouvert des magasins et des cafés sur le thème de Barbie, des possibilités qui n’avaient jamais été explorées jusqu’à maintenant. Il en est résulté que l’entrée de Barbie en Chine parut un peu confuse. Barbie a alors sous-localisé ; les vêtements Barbie vendus en Chine étaient trop « sexy » et ne correspondaient pas aux goûts des jeunes filles chinoises qui préfèrent généralement une mode plus « mignonne » et « girly ».
Une autre idée fausse souvent véhiculée par les entreprises étrangères lorsqu’elles entrent en Chine est de penser qu’il n’est pas nécessaire d’avoir un chinois dans l’équipe de direction. Les entreprises seraient bien avisées d’avoir un chinois local dans leur équipe et d’habiliter cette personne à guider et à orienter la stratégie. Ce représentant local connaît mieux que quiconque la dynamique politique, réglementaire et de consommation unique qui est en jeu en Chine et peut vous aider à orienter ou à faire rebondir votre entreprise selon vos besoins.
HI-COM: Lorsque l’on parle d’une entrée réussie sur le marché chinois, quels sont, selon vous, les éléments essentiels dont les entreprises devraient être conscientes ?
SR: Comprendre ce que veulent les consommateurs en entreprenant des recherches permanentes avec des retours réguliers. Les préférences des consommateurs et les canaux de distribution peuvent changer si rapidement en Chine qu’il est essentiel de suivre de près ce qui se passe chaque trimestre, sinon tous les jours. Vous devez comprendre que le commerce en ligne ici est un gros canal de distribution. Vous devez aussi trouver le bon gestionnaire qui connaît les politiques gouvernementales et qui peut vous aider à changer les stratégies si besoin. La politique et le marché sont intrinsèquement liés en Chine, créant un écosystème unique qui n’existe nulle part ailleurs.
HI-COM: Dans votre dernier livre, « The War for China’s Wallet » (« Le portefeuille de la Chine »), vous parlez des diverses initiatives prises par la Chine pour renforcer les liens commerciaux avec d’autres économies, comme One Belt, One Road. Quels sont les secteurs privilégiés au sujet desquels il est important de préparer une stratégie, compte tenu de la position politique actuelle de la Chine à leur égard ?

SR: Les acteurs du secteur industriel devraient très bien se porter sous le régime économique actuel de la Chine. Il y a actuellement une grande fierté et une vague de nationalisme en Chine, axées sur la fabrication et l’ingénierie locale. COMAC, le premier constructeur aérospatial appartenant à l’État chinois, est un bon exemple. Bien qu’il y ait beaucoup d’investissements et de concentration sur le marché local, cela crée d’immenses opportunités pour les entreprises étrangères qui peuvent bénéficier de contrats d’approvisionnement, ou fournir des composants ou des logiciels par exemple. Les entreprises chinoises restent prêtes à coopérer avec des entreprises étrangères. Outre l’aéronautique, des opportunités existent aussi pour d’autres secteurs comme celui de l’automobile, de l’énergie nucléaire et du tourisme. Le tourisme chinois devrait augmenter et atteindre 25 à 30% de l’ensemble du tourisme mondial.
[En ce qui concerne le marché des produits de grande consommation] les consommateurs chinois sont de plus en plus contents d’acheter des produits laitiers produits localement. Bright Food [une entreprise d’alimentations et de boissons basée à Shanghai] a connu une croissance constante et surpasse maintenant Nestlé dans certaines catégories.HI-COM: Pouvez-vous nous donner un exemple d’une entreprise ou d’une marque qui a eu particulièrement du succès en localisant sa marque ici, en Chine, et nous dire pourquoi, selon vous, les consommateurs chinois ont été séduits ?
SR: GNC, une entreprise américaine qui produit des vitamines et des compléments alimentaires a extrêmement bien réussi. GNC a identifié la tendance en plein essor des consommateurs chinois fortunés qui se concentrent sur la santé et le bien-être. Ils ont également été très habiles avec leur stratégie de distribution en ligne et hors ligne. Leurs prix sont également tout à fait corrects.
HI-COM: Contrairement à ce dont nous venons de parler, pouvez-vous nous donner l’exemple d’une entreprise ou d’une marque qui a raté sa cible en localisant son ‘histoire’ auprès des consommateurs chinois, et pourquoi cela est-il arrivé ?
SR: Nestlé est l’une des marques qui a raté sa cible par le passé auprès des consommateurs chinois. L’entreprise a été lente à trouver une solution face à la baisse de ses ventes et n’a pas compris qu’il y avait un énorme segment du marché chinois qui était prêt à payer un supplément pour certains produits. Il a été malavisé de penser que vendre des produits peu chers fonctionnerait partout en Chine.
Le dernier livre de Shaun Rein, « The War for China’s Wallet » (« Le portefeuille de la Chine ») aidera les entreprises à comprendre comment tirer profit des plans économiques chinois à l’étranger ainsi que de l’évolution de la base de consommateurs qui est de plus en plus nationaliste. Il est actuellement disponible sur Amazon.