Que faut-il pour réussir dans l’industrie de la musique et du son en Chine ?
L’un des secteurs d’activité qui évolue le plus rapidement en Chine est celui du son, de la musique et de la voix off (doublage de l’anglais vers le chinois). Le succès dans ce secteur d’activité n’est pas le fruit du hasard. Il faut des années pour réussir à savoir s’adapter rapidement, à trouver des solutions, et rester à l’affût des tendances. Nous avons récemment eu l’occasion d’en apprendre davantage sur ce secteur grâce à Thomas Faucheur, le PDG de GUM Shanghai, qui a plus de vingt ans d’expérience dans ce domaine. Il explique ici ce qu’il faut faire pour réussir dans l’industrie musicale chinoise.
Que faut-il faire pour avoir du succès dans l’industrie de la musique et du son en Chine ― Interview de Thomas Faucheur, PDG de GUM Shanghai
L’un des secteurs d’activité qui évolue le plus rapidement en Chine est celui du son, de la musique et de la voix off. Le succès dans ce secteur d’activité n’est pas le fruit du hasard. Il faut des années pour réussir à savoir s’adapter rapidement, à trouver des solutions, et rester à l’affût des tendances.
Nous avons récemment eu l’occasion d’en apprendre davantage sur ce secteur grâce à Thomas Faucheur, le PDG de GUM Shanghai, qui a plus de vingt ans d’expérience dans ce domaine. Il explique ici ce qu’il faut pour réussir dans l’industrie musicale chinoise.
GUM (GREEN UNITED MUSIC) Asia a été co-fondée en 2007 par Frédéric Monvoisin et Fabrice Dumont. Avec une équipe de production interne entièrement intégrée composée de compositeurs, de musiciens, d’ingénieurs du son et plus encore, GUM offre tout type de services, qu’il s’agisse des partitions musicales originales à la conception sonore et au doublage.
Pourquoi êtes-vous arrivés en Chine ? Quelle est l’histoire de GUM en Chine ?
Thomas : Nous avons créé GUM en Chine parce que l’entreprise et moi voulions vivre de nouvelles expériences différentes de celles que nous vivions à Paris.
Avant d’arriver en Chine, je ne faisais pas partie de GUM. J’avais ma propre société, mais je voulais vraiment faire quelque chose d’autre, ailleurs. Au même moment, GUM a commencé à s’implanter en Chine, donc nous avons décidé de déménager ma femme et moi ! Il y a cinq ans, la Chine n’était pas dans la liste des endroits où je voulais aller vivre; en fait, cette destination était probablement en bas de ma liste. Mais nous avons quand même décidé de venir ici avec GUM Paris.
Le premier studio faisait partie d’un autre studio de post-production appelé Digital District, mais il a fermé depuis. Après le premier studio, nous en avons ouvert deux autres. Le patron de GUM a décidé de s’implanter en Chine afin d’avoir plus d’opportunités et d’élargir le domaine du travail de l’entreprise, et c’était la même chose pour moi.
Donc, on dirait que, jusqu’ici, tout va bien ?
Thomas: Tout à fait ! Ça a été une expérience incroyable de venir en Chine. C’est une grande chance, mais ce qui est bien c’est qu’en vivant ici le temps passe très vite.
Démarrer une entreprise n’est pas la partie la plus difficile de la vie en Chine. Rester ici est un peu difficile, mais je n’ai pas eu de difficulté à vivre ici à mon arrivée. Nous essayons également de nous développer en dehors de la Chine. Nous sommes implantés à Shanghaï et nous essayons de nous implanter à Pékin également. Je me suis aussi rendu à Tokyo et à Singapour et j’envisage de poursuivre notre expansion là-bas à l’avenir.
Sur quels types de projets travaillez-vous ? Pouvez-vous nous donner un aperçu de l’industrie de la musique et de l’enregistrement sonore en Chine ?
Thomas : Les publicités, les événements et les films sont les principales activités sur lesquelles nous travaillons.
Nous travaillons surtout sur des publicités. Environ 70% du travail se fait dans ce domaine. Nous avons commencé à faire des longs métrages et nous terminerons notre premier en décembre. Une fois ce premier film terminé, j’ouvrirai une nouvelle succursale pour le cinéma. Nous aurons sept compositeurs de musique de film pour le cinéma exclusivement pour la Chine.
Nous participons aussi à de plus en plus d’événements, environ cinq à dix par an. Nous avons, par exemple, récemment travaillé pendant quatre jours sur un travail pour Cartier sur la musique, la conception sonore, les effets sonores, etc. pour des spectacles en direct. Nous travaillons également sur des projets avec des designers, mais ce sont de très petits projets.
Quel a été le projet le plus amusant en Chine ?
Thomas : Nous avons travaillé pour un musée à Wuxi. Un homme qui a fait fortune dans l’habillement et qui était passionné des chevaux, a ouvert une écurie pour élever des chevaux avec un hôtel et un musée sur sa passion. Nous avons créé la bande sonore d’un film 3D sur les chevaux qui se déroule pendant la Première et la Seconde Guerre Mondiale. C’était un projet historique, et c’était amusant de travailler dessus. C’était très intéressant et il a fallu plus d’un an pour terminer le projet.
Quels types de projets sont les plus difficiles pour vous et les plus difficiles pour le secteur dans lequel vous travaillez ?
Thomas : Peu importe si vous travaillez sur des publicités, des longs métrages ou autre chose, c’est toujours très difficile. Ici, vous travaillez sept jours sur sept et ça ne s’arrête jamais. Vous devez faire attention à ne pas vous surmener. Les gens vous appellent toujours pour faire des changements ; ils peuvent même parfois vous appeler à une heure du matin ! Maintenant, je fais plus attention pour ne pas m’épuiser. Cela peut être particulièrement difficile dans le cas des projets sur les annonces publicitaires, car les délais sont très courts. Alors, il faut faire attention.
L’une des difficultés est aussi la langue. C’est pourquoi nous avons engagé un nouveau producteur chinois. Traduire du chinois courant vers l’anglais peut être très difficile parce que je ne parle pas chinois. Nous éprouvons des difficultés à traduire quelque chose du chinois vers l’anglais parce qu’on ne peut pas toujours traduire la langue directement. Parfois la signification chinoise est différente de ce que l’on veut vraiment dire. Nous ne voulons pas prendre le risque de faire une mauvaise traduction, donc nous utilisons le chinois dans ces cas-là. Ce matin, par exemple, nous avons fini par utiliser du chinois plutôt que de l’anglais pour une chanson, mais quelqu’un devra quand même vérifier si nous avons utilisé les bons mots. Les différences culturelles sont aussi un défi parce que nous devons nous assurer que nous exprimons et expliquons les choses correctement.
En outre, je pense que tous ceux qui viennent en Chine trouvent qu’il est assez facile de s’intégrer.
Quand vous parlez de publicité, parlez-vous surtout de son ou de doublage ?
Thomas : Qu’il s’agisse de musique, d’effets sonores, de voix off ou de casting vidéo, tout ce qui touche au son, nous le faisons ici. Nous pouvons faire du mixage de son régulier aussi bien que du mixage pour le cinéma. Nous pouvons créer de la musique originale et faire des recherches musicales. Nous disposons également de notre propre bibliothèque musicale, d’une cabine vocale et de compositeurs de musique internes. À Paris, GUM est un label de musique, donc nous représentons des artistes. Nous sommes vraiment capables de faire tout ce qui est en rapport avec le son. C’est très vaste. Nous faisons aussi du doublage.
Quand vous parlez de doublage, que faites-vous ? Pouvez-vous nous expliquer le processus ?
Thomas : Par exemple, nous avons fait un court-métrage HP, où nous avons dû traduire de l’anglais vers le chinois, puis nous avons fait un casting pour trouver des voix pour cinq ou six personnages différents. A partir de là, nous essayons de vérifier l’âge du personnage principal par exemple, parce que nous avons besoin de trouver une voix similaire. Nous savons que nous avons besoin de trouver une femme chinoise d’environ 45 ans pour que sa voix corresponde à celle d’une femme anglaise de 30 ans. Nous essayons à chaque fois d’avoir plusieurs options pour que le client puisse choisir. Une fois que le choix des voix est confirmé, nous amenons les acteurs en studio pour faire l’enregistrement. Quand nous enregistrons, nous essayons de synchroniser les enregistrements le plus possible. Le doublage de l’anglais vers le chinois est quelque chose de très demandé dans notre activité.
Comment faites-vous cela ?
Thomas : Par exemple, lorsque vous dites « je vais travailler », on doit parfois raccourcir la phrase chinoise pour que les lèvres soient synchronisées avec la voix. Nous devons être créatifs pour penser à différentes façons de dire les choses. Quand nous recevons le script, nous avons notre producteur chinois qui teste la traduction. Ensuite, nous pouvons voir si nous avons besoin d’ajuster les paroles chinoises parce qu’elles sont généralement plus longues. Parfois nous n’avons besoin que d’un seul mot en chinois car la version anglaise est vraiment très courte, mais en même temps le chinois doit avoir la même signification qu’en anglais. Quand nous sommes satisfaits du script, nous sommes capables d’ajuster correctement la synchronisation labiale.
Le doublage est amusant, surtout lorsqu’une personne américaine parle chinois. Si la traduction est bien faite, ça fonctionne ! Peu importe si vous voyez un Américain parler chinois, ça fonctionne.
En outre, quand le doubleur chinois voit le vrai film, il devient animé, et vous obtenez cela dans la voix. Vous voyez aussi les acteurs de la vidéo ayant une certaine attitude pour correspondre au personnage qui est à l’écran.
Alors, les acteurs sont heureux d’être animés ?
Thomas : Oui, parce qu’ils jouent vraiment. Quand on fait de la voix off comme des slogans, c’est un peu différent. Mais quand on fait du doublage, c’est plus un jeu d’acteur, donc c’est vraiment amusant pour les acteurs.
Qu’est-ce qui rend GUM unique?
Thomas : Ici, en Chine, GUM est unique parce qu’il s’agit d’une entreprise entièrement intégrée et interne. En dehors des talents de voix-off comme les travailleurs indépendants, tout le reste fait partie de l’entreprise, comme les concepteurs sonores, les compositeurs, les producteurs, les ingénieurs du son, etc. Nous connaissons l’équipe donc nous connaissons les gens avec qui nous travaillons, ce qui aide beaucoup. Nous sommes vraiment très confiants lorsque nous avons des propositions car nous connaissons notre équipe et de quoi elle est capable.
De plus, nous venons d’un milieu musical. Avant de créer GUM en tant qu’agence de musique pour la production de films, nous étions un label de musique. Depuis le début, nous avons de nombreuses années d’expérience dans le domaine de la musique. Le label nous donne le mérite de vraiment travailler dans l’industrie de la musique. Le label et l’industrie de la musique nous rendent très forts, ainsi que toutes les choses internes. Ici à Shanghaï, nous avons les équipes les plus uniques et compréhensives. Il n’y a qu’une seule autre petite entreprise semblable à la nôtre, mais elle n’a qu’un seul compositeur contrairement à nous qui en avons quatre.
Lorsque vous travaillez dans le cinéma, composez-vous pour des productions cinématographiques chinoises ?
Thomas: Eh bien, 100% des films sur lesquels nous travaillons sont chinois. Nous avons travaillé sur un projet pour une société en Thaïlande, mais presque 100% de nos projets proviennent d’agences chinoises de production de films chinois.
Quand vous travaillez sur place pour un film chinois, travaillez-vous avec des célébrités pour enregistrer quelque chose en studio ?
Thomas: Nous avons déjà travaillé avec des célébrités, mais pas en Chine car la plupart d’entre elles travaillent partout dans le monde. Nous avons travaillé avec Gong Lee, car c’est l’une des représentantes de L’oreal. Nous avons fait quelques séances d’enregistrement avec elle. Elle était à notre studio à Paris et nous étions là. Grâce à une technologie spéciale, l’agence était ici avec nous pour diriger Gong Lee. Nous avons aussi travaillé avec une autre actrice chinoise quand elle était à Los Angeles. Nous devions nous réveiller très tôt, vers 4h30 du matin, à cause du décalage horaire.
A part cela, en Chine, nos voix-off de talent sont principalement des talents locaux. Toutes les voix-off de talent ne fonctionnent pas à l’écran.
Comment l’avancement de la technologie a-t-il affecté votre secteur d’activité ?
Thomas : La technologie du son a progressé beaucoup plus vite que la technologie vidéo. Il y a 20 ans, on parlait de home studios où les compositeurs pouvaient se procurer leur matériel pour jouer des instruments. Aujourd’hui, pour nous et le compositeur, 99% de la musique que nous créons est numérique. On appelle cela des instruments virtuels. Il est parfois très difficile de faire la différence entre une base réelle et une base numérique. C’est un excellent moyen pour le compositeur d’obtenir le son sans que le joueur de base ne vienne en studio.
Quelles sont les qualités requises pour réussir dans ce métier ?
Thomas: Vous devez être capables de réfléchir rapidement et d’être extrêmement agiles. Vous devez aussi réfléchir avant de dire quelque chose et avoir des solutions rapidement car les délais sont parfois très courts. Par exemple, nous avons créé une piste, mais elle n’a pas plus au client. Il a donc demandé d’ en écouter une nouvelle demain matin. Cela prend un peu de temps même si ce n’est qu’une piste qui dure 85 secondes. Certains compositeurs et paroliers prennent leur temps afin de réfléchir et d’être capables de créer quelque chose d’unique et de bien produit. Ce sont des situations communes et le fait d’avoir de nombreuses années d’expérience m’aide à trouver des solutions rapidement.
Les gens d’ici sont très exigeants, il faut donc aussi être capable de bien gérer le stress. Sinon, vous finirez par ne plus vouloir faire partie de ce secteur. Cependant, la clé de ce marché est la vitesse d’adaptation et d’exécution !
Par rapport à l’Occident, quel genre de tendances observez-vous en Chine ? Comment voyez-vous leur évolution au cours des prochaines années ?
Thomas: En arrivant en Chine, je pensais que le style musical serait très daté ou très chinois, mais c’est en fait le même style de musique que nous écoutons en Europe et aux Etats-Unis. Les chinois sont très au courant de ce qu’il se passe dans le monde. Il y a deux ans, les gens se concentraient sur la musique électro. L’an dernier, c’était le rap, jusqu’à ce qu’un type fasse quelque chose de déplacé, et la mode a vite disparue. Les tendances changent rapidement. Vous pouvez passer de l’électro, à l’EDM, la trap music, le rock, le pop-rock, la musique classique, néoclassique. Cela dépend vraiment du projet, mais les chinois sont vraiment conscients du type de musique qui fonctionnera. De nombreux clients arrivent avec une référence musicale d’iTunes ou de YouTube, ce qui est très utile. Ces références peuvent parfois être très avant-gardistes. Les clients vont vraiment explorer !
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